Robert Desnos est l’un des poètes les plus attachants et les plus étonnants parmi les surréalistes français. D’abord il est né en 1900. Essayez de naître en 1900 ! Ensuite il oublie sa famille pour vivre sa vie à lui. Je ne raconte pas sa vie. Sa vie, elle se termine en 1945, au camp de concentration de Térézine. Il finit donc « libéré ». Desnos est un homme libre à jamais.
Un extrait de son poème « Baignade » permet d’entrer en contact avec Desnos le poète. Cette « baignade » est un plongeon dans un univers de fruits et légumes. Une baignade dans les hors d’œuvres. Si! sa poésie est alimentaire, on en mangerait, et d’ailleurs on en mange ! C’est une poésie à déguster…voyez vous-même :
« Où allez-vous avec vos tas de carottes ?/Où allez-vous nom de Dieu ?/Avec vos têtes de veaux et vos cœurs à l’oseille ? »
Je vous le disais, un poème de Desnos, ça se mange sur place. C’est fait pour le pique nique. Vous avez le menu, vous pouvez préférer la viande ou vous restez végétarien ? A moins que « l’oseille » vous évoque l’argent et alors « le cœur à l’oseille », ce n’est plus une recette de cuisine. Mais ça fait penser à tous ces écrivains qui sont motivés par le fric. Attendez la suite :
« Nous allons pisser dans les trèfles et cracher dans les sainfoins ! »
Excellent programme !
Cette étrange invitation au voyage marque une incontinence (pisser) sans aucune retenue.
Desnos refuse les bonnes manières. On le voit avec « cracher ». « J’irai cracher sur vos tombes » n’est pas loin. Et sur quoi crache-t-il et pisse-t-il, Robert Desnos ? Sur la création elle-même :
Les « trèfles » (l’argent?) et les sainfoins (ou peut-être les saints foins ?) Desnos crache sur tout ce qui est sacré dans notre société.
Reste une phrase dont il serait criminel de vous priver :
« Avec vos cœurs d’andouille, avec vos couilles de lion »
On reconnaît Richard couille de lion, bien connu des historiens. Sous une autre appellation. L’avantage de cette version culinaire, c’est qu’on peut manger l’andouille avec Richard. Richard est devenu une nourriture terrestre. Et tout ça assaisonné avec les carottes, et l’oseille. On aurait tort de s’en priver
Vous reprendrez bien un peu de Robert Desnos ?
J’ai le pélican façon capitaine Jonathan, voici ce que ça donne :
Le capitaine Jonathan
Etant âgé de dix huit ans
Capture un jour un pélican
Dans une île d’extrême orient…
Et vous savez ce qui se passe ?
Le pélican se met à pondre (un œuf tout blanc, sinon ça ne rime pas)
« Et il en sort un pélican
Lui ressemblant étonnamment »
Et ainsi de suite indéfiniment. Desnos procède à la multiplication des pélicans.
Heureusement on peut s’arrêter quand on est rassasié. Robert Desnos conseille l’omelette :
« Cela peut durer pendant très longtemps
Si l’on ne fait pas d’omelette avant. »
Il a encore d’autres recettes de cuisine, Robert Desnos, comme par exemple « cette fourmi de dix huit mètres, avec un chapeau sur la tête »
Avalez sans modération !
« Et les quatre sans cou », ça se mange aussi ! Allez vous servir vous-même.
La poésie de Robert Desnos est alimentaire, je vous le disais. Et faite avec des bons produits, comme on dit tous les jours en 2015 à la Télévision…