Mayotte est un département et une région d'outre-mer (DROM) depuis maintenant cinq ans. Le problème, c'est qu'il est impossible de s'en rendre compte. Cet ensemble d'îles n'a rien à voir avec le reste de la République française. Le principe d'égalité y est une douce chimère. Le RSA local est deux fois inférieur au RSA métropolitain, tandis que le coût de la vie est plus élevé – du fait de l'importation des marchandises. La bouffe dans les hypermarchés est hors de prix, les produits frais sont souvent indisponibles et les loyers sont les mêmes qu'en métropole. Le Code du travail français ne s'applique pas intégralement, et un actif mahorais sur trois est au chômage. D'après une étude de l'Insee datée de 2012, 58 % des habitants en âge de travailler ne maîtrisent pas les compétences de base à l'écrit en français.
Cette absence de perspectives explique en partie les scènes de guérilla urbaine qui se sont multipliées dans le département lors des dernières semaines. Depuis le début de la grève, les barrages routiers sont omniprésents. Il m'est arrivé de ne pas pouvoir rentrer chez moi entre deux nuits de travail à l’hôpital.
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Au-delà du simple désastre sanitaire, le contexte économique et social très difficile a poussé les gens à descendre récemment dans la rue. Ils protestent à juste titre contre l'abandon dont ce département est victime. Malheureusement, la situation s'est envenimée quand des jeunes s'en sont mêlés. Dans le quartier de M'tsapéré, il m'est arrivé de croiser une bande de gamins armés de machettes.
Un mec a fini par se faire poignarder, et les représailles ont dégénéré. Le bilan ? Une centaine de voitures caillassées et des forces de l'ordre dépassées. L'hélicoptère de la gendarmerie balançait du gaz lacrymogène depuis les airs, ce qui obligeait les habitants à se terrer chez eux. Après cela, des renforts de la Réunion ont débarqué.