Malgré les dénégations de Kerry, tout le monde pointe Washington et Tel Aviv, et peut-être bien Bruxelles aussi. L’Etat-major turc est connu depuis longtemps pour ses sympathies pro Otan, pro US et pro Israël. Le général commandant le putsch, commandant de l’armée de l’air, Akin Ozturk, a été attaché militaire à Tel Aviv. Bekir Ercan Van, le commandant de la base aérienne de Incirlik a été arrêté après s’être vu refuser l’asile politique aux US. S’ils avaient réussi, ils auraient été applaudis et fêtés en Occident. Et oui, c’était bien un coup d’Etat, et c’est un ratage.
L’homme derrière le putsch est réputé être Fethullah Güllen, jadis allié d’Erdogan, mais maintenant son ennemi acharné. On prétend que son organisation Hizmet (le Service) constitue un « Etat profond », ou un « Etat parallèle » en Turquie et au-delà, avec des millions de partisans à tous les niveaux, quelque chose de semblable aux francs-maçons de jadis. L’ancien officier du FBI Sibel Edmonds, lanceur d’alerte, a décrit le réseau de Gülen comme une création de la CIA.
Les Russes se sont débarrassés de Gülen en interdisant les activités de Hizmet en Russie depuis 2008. Le pilote du F-16 turc qui a failli changer l’histoire du Proche Orient en abattant le bombardier russe SU-24 au-dessus de la Syrie le 24 novembre 2015 (et qui s’appelait Mustapha Hajruoglu, ont affirmé ses concitoyens bosniaques) s’est avéré être un homme de main de Gülen et un putschsite, a dit le maire d’Ankara Melih Gökcek. Son hélicoptère a été abattu à Ankara. Ce n’est pas un exemple d’improvisation : en mars 2016, le journal pro-gouvernemental Sabah a suggéré que le pilote du F-16 était un partisan de Gülen et avait agi selon ses instructions. Que Gülen ait été hostile à la Russie pour des raisons personnelles ou qu’il ait obéi à des ordres de la CIA, il a réussi à créer l’inimitié entre Poutine et Erdogan.
Apparemment l la courageuse décision d’Erdogan de présenter ses excuses à la Russie et de revenir vers elle avait précipité le putsch. Il y avait des rumeurs à Moscou, selon lesquelles les services secrets russes avaient prévenu Erdogan quelques minutes avant l’attentat, ce qui lui a permis de s’enfuir vers İstanbul. Mais il s’agit peut-être d’un souhait rétroactif.