Ces mesures ont beau contrevenir aux conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT), à la charte sociale du Conseil de l’Europe, au traité de Lisbonne et à certaines directives européennes, elles ont été appliquées en Grèce. Leurs effets sont dramatiques. Sur le plan macroéconomique d’abord. Entre 2010 et 2016, le PIB s’est effondré de 27%. Le nombre de petites et moyennes entreprises a fondu, passant de 900.000 en 2009 à 450.000 aujourd’hui. Le chômage est le plus élevé de la zone euro ; à moins de 10% en 2009, il frappe aujourd’hui 21,7% des actifs, et même 44,4% des 15-24 ans.
Sur le plan du travail ensuite, « flexibilisation et précarisation sont les conséquences de ces décisions », poursuit Savas Robolis. Un travailleur sur cinq n’est pas déclaré́ du tout et 200.000, au moins, travaillent à plein-temps, alors qu’ils sont déclarés à temps partiel auprès du ministère du Travail. 300.000 autres sont embauchés comme indépendants et ont donc les cotisations sociales à leur charge. Plus de 50% des nouvelles embauches se font à temps partiel.
Mais les entreprises n’ont pas seulement taillé dans les dépenses sociales. Elles ont aussi coupé dans les dépenses pour l’hygiène et la sécurité. L’été 2017 en a été le triste révélateur ; les médias comme The Press Project ou Rizospastis ont égrené dans leurs pages les accidents du travail, une vingtaine au total. À Elefsina, un syndicaliste déplore : « Nous ne pouvons plus contrôler les entreprises comme Top Gas. Les portes sont fermées aux syndicats. Nous n’avons pas de moyen de pression… » Selon un rapport de l’inspection du travail, les accidents du travail, y compris mortels, sont passés de 5.721 déclarés en 2010 à 6.500 en 2016 malgré la hausse du chômage et la baisse de 30% de l’activité des entreprises.
Du côté des syndicats grecs, un interlocuteur sourit à l’évocation des lois Macron : « Bienvenue dans la jungle grecque. Nous n’étions qu’un cobaye ». Sourire amer, averti. Et prévenant.