Aucune grande agence de presse, que ce soit aux États-Unis ou en Europe, n’a rapporté cette nouvelle scientifique. Car, depuis longtemps, ce que disent les médias au sujet de la sécurité des téléphones portables ne reflète que les perspectives de l’industrie du sans fil. Depuis un quart de siècle, l’industrie a orchestré une campagne mondiale de relations publiques visant à induire en erreur non seulement les journalistes, mais aussi les consommateurs et les décideurs politiques au sujet des données scientifiques concernant le rayonnement des téléphones mobiles.
Fait remarquable, les téléphones mobiles avaient été autorisés sur le marché américain une décennie plus tôt, sans aucun test de sécurité mené par le gouvernement. Maintenant, on a diagnostiqué des cancers chez certains clients et travailleurs de l’industrie. En janvier 1993, David Reynard poursuivait la société NEC America, affirmant que c’était le téléphone NEC de sa femme qui lui avait provoqué une tumeur cérébrale mortelle. Après l’apparition de Reynard à la télévision nationale, l’histoire a pris de l’ampleur. Un sous-comité du Congrès a annoncé la tenue d’une enquête ; les investisseurs ont commencé à se débarrasser des actions de téléphonie mobile et Wheeler et la CTIA sont passé à l’action.
À cette date, le WTR avait déjà organisé plus de 50 études originales et en avait examiné beaucoup d’autres. « Ces études soulèvent de ‘sérieuses questions’ sur la sécurité téléphonique », déclarait Carlo lors d’une réunion à huis clos du conseil d’administration de la CTIA, dont les membres comprenaient les PDG ou les hauts dirigeants de 32 des principales entreprises de l’industrie, dont Apple, AT&T et Motorola.
Des lettres furent envoyées à chacun des chefs de l’industrie, le 7 octobre 1999, réitérant que les recherches du WTR avaient révélé ce qui suit : le risque de « tumeurs neuroépithéliales rares à l’extérieur du cerveau a plus que doublé… chez les utilisateurs de téléphones cellulaires » ; il y a une corrélation apparente entre les « tumeurs cérébrales du côté droit de la tête et l’utilisation du téléphone du côté droit de la tête » ; et « la capacité du rayonnement de l’antenne d’un téléphone à causer des dommages génétiques fonctionnels [est] définitivement positive ».
Dans les années qui ont suivi, les conclusions du WTR ont été reproduites par de nombreux autres scientifiques aux États-Unis et dans le monde entier. En 2011, l’Organisation mondiale de la santé classait le rayonnement des téléphones portables comme cancérogène pour l’homme, et les gouvernements du Royaume-Uni, de France et d’Israël émettait des mises en garde contre l’utilisation de ces téléphones par les enfants.
Néanmoins, la campagne de propagande de l’industrie désamorcera suffisamment l’inquiétude pour qu’aujourd’hui, trois adultes sur quatre dans le monde possèdent un portable, faisant de l’industrie du sans-fil l’une des plus grandes au monde.
L’Internet des objets nécessitera d’augmenter la technologie 4G actuelle avec la technologie 5G, augmentant ainsi « massivement » l’exposition de la population générale aux rayonnements, selon une pétition signée par 236 scientifiques du monde entier qui ont publié plus de 2 000 études évaluées par des pairs et représentent « une partie importante des scientifiques accrédités dans le domaine de la recherche sur les rayonnements », selon Joel Moskowitz, directeur du Center for Family and Community Health de l’Université de Californie, Berkeley, qui a aidé à faire circuler la pétition. Néanmoins, comme pour les portables, la technologie 5G est sur le point d’être introduite sur le marché, sans tests de sécurité préalables.
L’absence de preuve définitive qu’une technologie est nuisible ne signifie pas que la technologie est sûre, mais l’industrie du sans-fil a réussi à vendre cette erreur logique au monde entier. Le résultat est qu’au cours des 30 dernières années, des milliards de personnes dans le monde ont fait l’objet d’une expérience de santé publique : utiliser un téléphone portable aujourd’hui, découvrir plus tard s’il cause des dommages génétiques ou un cancer. Entre-temps, l’industrie a fait obstacle à une compréhension complète du phénomène et les organismes de presse n’ont pas informé le public de ce que les scientifiques pensent vraiment. En d’autres termes, cette expérience de santé publique a été menée sans le consentement éclairé des cobayes.