L’expérience est fascinante. Vous prenez un macaque, vous lui implantez des capteurs (2.000 électrodes) dans le cerveau et vous lui apprenez à se servir d’un jeu vidéo en usant d’un manche à balai pour déplacer un objet sur l’écran. Pendant ce temps, l’activité électrique de son cerveau est mesurée, enregistrée, analysée, décryptée, de façon à déterminer quels signaux à quels endroits précis du cerveau induisent quelle réponse motrice. Une fois que les modèles ont été déterminés, vous débranchez le manche à balai et vous reliez directement le logiciel qui réceptionne et analyse en temps réel les signaux perçus par les 2.000 électrodes avec le jeu vidéo. Le cerveau du singe se passe d’un ensemble de médiateurs sensoriels (sa main et le manche à balai relié à l’ordinateur de jeu) pour agir directement, pour jouer et bien jouer. C’est Neuralink, une start-up financée par Elon Musk, qui a réalisé cette expérience.
Des signaux, parfaitement naturels et de nature biochimique, de simples interactions entre neurones sont initiés ici par le cerveau et captés et exploités par une machine. Mais peut-être qu’un jour, ces électrodes, au lieu d’être de simples agents passifs en charge d’une observation, deviendront capables d’initier au sein même du cerveau, et sur ordre d’un système extérieur, une de ces réactions biochimiques qui font que notre cerveau commande à notre corps.
La promesse transhumaniste d’un homme éternel et réparable à l’infini, multipotent et capable de s’affranchir des limites qui s’imposent à lui, continue de générer des rêves et des investissements colossaux. J’espère qu’elle se fracassera un jour, bientôt, contre un mur bien réel dont j’ignore s’il sera de nature technique, économique ou social.
J’attends ce jour avec impatience.