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21 août 2021 6 21 /08 /août /2021 10:42

On savait que le pantin qui nous sert de président n’avait pas de lettres, je veux dire pas de culture humaniste et littéraire, mais pour compenser, il a des chiffres !

Pas de lettres ? Vous n’avez pas oublié que nous ne sommes « plus au temps de la princesse de Clèves », ni d’ailleurs dans aucun autre temps du passé. Par contre les chiffres pullulent, et ils sont toujours le résultat de calculs invérifiables, mais nous y sommes habitués. Par exemple, les chiffres de la délinquance sont bons. Les chiffres du chômage sont meilleurs ! Tous les chiffres sont toujours bons, on en mangerait ! C’est la délinquance qui n’est pas bonne, c’est le chômage qui est mauvais. 

Je préfère donc les lettres, je veux dire les mots. Ainsi, on a supprimé l’ANPE, et on l’a remplacée par le « Pôle emploi ». On commençait à en avoir assez de cette Agence Nationale Pour l’Emploi ! Une « agence », ça fait petit boutiquier du coin de la rue. Tandis que le « pôle » élargit l’emploi à toute la planète. On a l’impression que c’est du sérieux, et que les chômeurs, on s’en occupe, partout dans le monde, on cherche, fébrilement, en permanence. D’ailleurs, on consent à dire « chômeur », mais on préfère « demandeur d’emploi ». Le « demandeur » n’est pas loin du « quémandeur » (celui qui demande avec insistance). Le demandeur tend la main pour harceler le riche et obtenir ce qui ne lui est pas dû. Le demandeur est un emmerdeur, qui n’est jamais content.

On conserve cependant le mot « chômeur », parce qu’on peut le qualifier de « partiel », ce qui atténue la mauvaise impression première. Avec les « aides », le gouvernement actuel nous donne l’illusion qu’il vole au secours des plus démunis, même si ces aides sont destinées aux entreprises « qui recourent au chômage partiel », je vois que vous suivez, et que tout le monde a compris. Non ? Justement, ces informations d’apparence très technique sont destinées à nous empêcher de comprendre.

Toutefois, lorsqu’on veut bien s’en tenir à quelques termes essentiels, c’est beaucoup plus clair. Par exemple, les « partenaires » sociaux, voilà une formule qui devrait susciter la réflexion. Le partenaire est engagé dans un jeu. On en parle également pour la danse, et même pour les relations sexuelles. C’est ce dernier sens qui me paraît dominer quand les ministres rencontrent les syndicalistes. En effet, manifestement, les ministres les entubent régulièrement. Ils invoquent alors le « redressement » des bourses. On ne saurait être plus clair. Les représentants du monde ouvrier repartent, la queue basse, après s’être fait baiser, avec ces bourses qui se redressent toujours !

Décrite de cette façon, la « négociation » sociale apparaît dans toute sa crudité. Il serait, je pense, urgent de s’exprimer ainsi. J’ai eu un dialogue amusant avec un responsable d’une banque qui porte le titre, très parlant, de « superviseur ». Ce pauvre dégénéré non content de nous « viser », comme à la chasse, nous « supervise ». Vous avez tous noté, d’ailleurs, que la clientèle est « ciblée » par la publicité, qui est donc une arme. Je reviens à ce banquier et je rapporte le dialogue :

- Monsieur, vous avez été au-delà du découvert autorisé, je suis le superviseur ! 

Réponse :

- Superviseur mon cul…

Un peu interloqué, mon interlocuteur se réfugie derrière les bonnes manières :

- Monsieur, je suis courtois, moi...

- C’est bien ce que je te reproche, t’es un menteur et un sale con…

Et je raccroche. Eh bien, je vous assure qu’ils ne sont pas habitués à ce lexique, les enfoirés à la solde des banques. Et si on leur parlait toujours ainsi, le « dialogue social » aurait tout de même une autre allure !

 

ROLLAND HENAULT

(« Articles - Volume 1 » - Editions de l’Impossible 2019)

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