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19 novembre 2022 6 19 /11 /novembre /2022 11:33

Pour mesurer l’évolution de la pauvreté en France, la statistique publique étudie les ressources des ménages. Par souci de comparabilité avec les autres pays européens, on considère comme pauvres les personnes ayant un niveau de vie inférieur à 60% du niveau de vie médian des ménages (1 132 € en 2020) et comme extrêmement pauvres celles dont le niveau de vie n’atteint pas 40% du niveau de vie médian des ménages (755 € en 2020).

Suivant cette mesure, en 2021, 93% des ménages rencontrés par le Secours Catholique vivaient sous le seuil de pauvreté et 69%, sous le seuil d’extrême pauvreté.

Surtout, le taux de pauvreté ne rend compte que de la moitié de l’équation budgétaire que les ménages doivent résoudre. L’autre moitié, ce sont les dépenses, et notamment celles sur lesquelles peu de marge de manœuvre existe à court terme, c’est-à-dire celles liées  par  un  contrat  (loyer,  charges,  assurances,  frais  scolaires...).  Or  ces  dépenses  pré-engagées absorbent en moyenne près de 60% du revenu des ménages en situation de précarité, contre 30% pour l’ensemble de la population vivant en France. Elles pèsent particulièrement lourd pour les femmes seules.

Souvent incompressibles, ces dépenses ont vu leur poids s’alourdir mécaniquement pour les ménages dont les ressources ont chuté lors de la crise sanitaire : pour un quart d’entre eux, les dépenses pré-engagées sont progressivement venues absorber plus des trois quarts de leurs revenus !

Si on enlève d’autres dépenses quasi incompressibles (transport, pension alimentaire, dettes...), le tableau est encore plus sombre : deux ans après l’émergence de la crise, la moitié des ménages étudiés disposent d’un reste pour vivre de moins de 5€ par jour et par personne (soit une diminution de 0,5 à 1€ selon les ménages par rapport au niveau d’avant crise. Avec cela, il faut acheter à manger, des produits d’hygiène, s’habiller... Or le Secours Catholique estime la dépense minimale d’alimentation à au moins 7€ par jour et par personne. Deux ans après le début de la crise, 48% des ménages rencontrés se retrouvent donc dans l’incapacité de couvrir leur dépense alimentaire quotidienne (+3 points en deux ans). Difficile dès lors de payer les loisirs des enfants. Voire impossible quand on a moins de 1,50€ par jour en reste pour vivre, comme un quart des ménages rencontrés. Le reste pour vivre d’un ménage sur cinq était même nul ou négatif, les contraignant à s’endetter pour couvrir leurs besoins de base !

Les politiques publiques ont la capacité de cibler les ménages risquant d’être étranglés financièrement. Autrement dit, une politique volontariste pourrait éliminer la grande pauvreté dans notre pays, qui s’y est d’ailleurs engagé d’ici 2030 auprès des Nations unies.

Ce n’est pas, à ce stade, le choix qui a été opéré : les populations ciblées par les aides ont certes survécu à la crise sanitaire, mais en sont ressorties appauvries (ainsi, le niveau de vie mensuel médian des mères isolées est passé de 730€ avant le Covid à 710€ deux ans après). Et les mesures prises ont laissé de côté des populations dont la crise a révélé la grande vulnérabilité.

Déstabilisés par l’impact de la crise sur leurs ressources financières déjà fragiles, certains ménages  dont  on pouvait  penser  que  la  situation  de  précarité  serait transitoire se retrouvent dans une pauvreté qui pourrait devenir chronique, au regard du poids des dépenses contraintes accru par l’inflation.

 

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