Des barquettes imprimées imitant un tissu vichy qui évoque la tradition française et les pique-niques dominicaux : c’est le packaging fréquemment utilisé dans les grandes surfaces pour commercialiser la viande chevaline. Mais derrière l’emballage, on est bien loin de l’art de vivre à la française et des prairies verdoyantes de carte postale.
La plupart du temps, la viande commercialisée provient du Nouveau monde, notamment d’Argentine, du Canada et d’Uruguay. Or, les conditions de détention et d’abattage des équins dans ce pays d’Amérique du Sud sont bien loin des standards européens en matière de protection animale, même lorsque les abattoirs dont proviennent les carcasses sont agréés par l’Union européenne.
Plusieurs enquêtes menées depuis 2021 par Animal Welfare Fondation/Tierschutzbund Zürich (AWF/TSB) avec le soutien de Welfarm mettent un coup de projecteur sur les conditions d’abattage des chevaux en Uruguay.
Battus, émaciés, blessés, parfois gravement, laissés sans soins dans les pâtures, les chevaux abattus en Uruguay sont régulièrement détenus dans les abattoirs dans des conditions déplorables avant d’être mis à mort (manque d’eau, de nourriture, de soins, d’accès à l’ombre et à des abris contre les intempéries…).
Ces animaux ne sont d’ailleurs pas élevés pour l’alimentation humaine : il peut s’agir de chevaux de trait réformés, de juments issues de fermes à sang, de chevaux de course trop vieux pour la compétition, etc.
Des conditions qui ne semblent pas émouvoir certains acteurs économiques français, qui n’y voient qu’un marché parmi d’autres. C’est particulièrement vrai pour la viande chevaline en provenance de l’abattoir Clay, situé en Uruguay, puisque le rôle d’entreprises françaises est central sur ces importations, de l’abattoir à la distribution en France, en passant par l’importation et le conditionnement.
La Société Normande de Viandes et Courtages (SAS SNVC), basée à Toutainville, dans l’Eure, commercialise de la viande chevaline en provenance de l’abattoir Clay, importée par la société d’import-export de viande P. Harinordoquy & fils, basée à Bordeaux. Or, l’abattoir Clay et les deux entreprises françaises appartiennent tous les trois à l’entrepreneur français Yon Harinordoquy. Le Groupe Harinordoquy contrôle donc la totalité de la filière, de l’abattage en Uruguay jusqu’à l’assiette du consommateur français.
L’enquête d’AWF/TSB en Uruguay a été menée dans les trois abattoirs du pays approuvés par l’Union européenne : Sarel, El Amanecer et… Clay, l’abattoir détenu par le Groupe Harinordoquy. La SNCV, qui commercialise en France la viande chevaline en provenance de cet abattoir, ne peut donc qu’être au fait des conditions de détention et d’abattage des chevaux sur le site uruguayen.