Lundi soir, la ministre de la Culture était à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), non pour visiter l’église Saint-Sulpice, du XIIe siècle et classée monument historique, mais pour assister au « DVM Show Freestyle ». Cette scène du rap français, créée par un certain Mohamed Hadji, est le rendez-vous le plus couru du moment, avec un public essentiellement masculin. Il est diffusé sur Twich. Sur un air de rap « afrolove », les stars de la soirée étaient Dadju et Tayc - et Rachida, surprise de la soirée.
Dadju, frère du célèbre Maître Gims, est un Franco-Congolais né à Melun. Ne le sous-estimez pas : il est ambassadeur culturel de la République démocratique du Congo. Le personnage est exempt des habituelles polémiques propres aux rappeurs. À part des propos sur les Antilles qui avaient déplu, l’artiste dénigrant le zouk et s’autorisant ce jugement : « J’ai rien contre les Antillais, mais vous aimez trop taffer à votre rythme. » Dans ce racisme anti-antillais, Tayc le rejoint : « Les Antillais, c’est des esclaves, à la base… Alors comment peuvent-ils se sentir supérieurs aux Africains ? » Ce Marseillais d’origine camerounaise s’est fait remarquer par ses propos méprisants sur les femmes noires en général et un sexisme de plus ou moins bon goût. Il a dû réécrire sa chanson Quand tu dors, qui faisait l’éloge du viol conjugal. « Afrolove », qu’on vous dit.
Voilà qui n’était pas pour effrayer une Rachida Dati enthousiaste qui, montant sur scène, les a invités à venir se produire au ministère de la Culture. « Mais on fait du bruit, tu sais!», dit l’un des rappeurs (on se tutoie). « Un ministère de la Culture sans bruit, réplique Rachida Dati, ce n’est pas un ministère de la Culture ! » Jack Lang n’a qu’à bien se tenir. Tayc a posté sur TikTok une vidéo où elle improvise une danse avec Dadju qui chante, façon ambiance de la brousse : « Son nom c’est Rachida ! Eh ! Mme Rachida ! On va à droite ! On va à gauche ! » - chorégraphie ou ligne politique ? Depuis sa prise de fonction, Rachida Dati a organisé ses vœux au musée de l’Immigration, a assisté à une démonstration de gumboot à la Philharmonie de Paris ; la voici rappeuse, et sans rancune.
Cette histoire est à chier.