Le système est bien fait. En France, le droit d’émettre n’appartient pas aux chaînes. Les fréquences TNT, comme les fréquences des chaines hertziennes (TF1, France 2, M6…), comme les fréquences radio (Europe 1, RTL, France Inter…), appartiennent à l’État. Charge à l’Arcom d’attribuer les fameuses fréquences et de faire la police. Une façon plutôt restrictive d’interpréter la Déclaration des droits de l’homme du 26 août 1789 : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. » Mais c'est la France qui se rapproche, toutes sirènes hurlantes, des républiques bananières.
Or, en France, le gendarme de l’audiovisuel, l’Arcom, est une instance très très politique. Et très macroniste. Parmi les neuf « sages », le président de l’Arcom a été nommé en 2022 par… le président de la République Emmanuel Macron, en toute simplicité. Trois des huit membres restants ont été nommés par le président de l’Assemblée nationale en 2022 et 2023, donc soit par la macroniste Yaël Braun-Pivet, soit par son prédécesseur le macroniste Richard Ferrand. Quatre membres de l’Arcom sur neuf, dont le président (sa voix est prépondérante), doivent donc leur (très confortable) poste au pouvoir en place. Restent trois membres désignés par le président du Sénat (de droite) et deux respectivement par la première présidente de la Cour de cassation et le vice-président du Conseil d’État. Pas à l'abri, non plus, de l'influence du pouvoir.
Le même Arcom avait justement consciencieusement préparé le terrain en bombardant de sanctions historiquement sévères la chaîne C8, ce qui permet au média d’État RFI de titrer : « Médias: l’Arcom écarte C8, la chaîne la plus sanctionnée de la télévision française. » En quelques années, C8 a écopé de… 7,6 millions d’euros d’amendes ! Du jamais-vu. L'animateur vedette de C8, Cyril Hanouna, qui appela un Macron tout miel, en direct dans l’une de ses émissions, est soudain passé dans la catégorie des menaces pour la République. C8 peut faire appel de la décision devant le Conseil d’État… qui a été lui-même d’une étrange sévérité, ces derniers temps, vis-à-vis des chaînes du groupe Bolloré. Le système est bien fait...
Enfin, dernière couche politique à ce dossier décidément trouble : l’Arcom a choisi, pour remplacer C8 et NRJ 12, deux chaînes qui ne risquent pas de donner des cauchemars au Président Macron. La première, OFTV, est une émanation du puissant groupe Ouest-France, qui ne brille pas par son esprit critique envers le pouvoir... La seconde, Réels TV, est financée par le milliardaire tchèque Daniel Křetínský, qui fit très peur à la Macronie en acquérant Marianne et en rentrant dans Le Monde, mais qui n’a cessé, depuis, de montrer patte blanche en revendant Marianne (en cours), en cédant ses parts dans Le Monde (en 2023) et en investissant dans Elle, dans le très gauchiste Loopsider (qui sera impliqué dans la nouvelle télé), sans oublier le prêt de 15 millions d’euros sans conditions à Libération, en 2022…
Les moutons médiatiques seront bien gardés !