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14 décembre 2024 6 14 /12 /décembre /2024 10:07

J’avais demandé aux élèves de lire La Chambre des officiers de Marc Dugain, roman plus simple que le premier que nous avions étudié. Un gros contrôle était prévu pour évaluer leur lecture et leur révision de tout ce que nous avions fait sur le thème de la guerre. L’élève en question a bien évidemment séché le contrôle, grâce à la complaisance de la nouvelle infirmière, qui n’a vraisemblablement pas compris que nos élèves étaient en bonne santé et qu’il y avait un loup quand 90 élèves sur les 360 que compte le collège défilaient dans son bureau en une seule journée… La vie scolaire s’arrache les cheveux, d’autant plus que je leur ai évidemment demandé de trouver un créneau pour permettre aux quatre élèves qui avaient passé les deux heures du contrôle à l’infirmerie de refaire un devoir.

Je leur ai donc demandé de rédiger un texte répondant aux questions suivantes. Pourquoi, selon vous, est-il si difficile pour un humain d’être défiguré ? Comment peut-on réussir à surmonter cela et à se reconstruire ? Suivaient six lignes dans lesquelles je leur donnais une certain nombre de pistes et d’idées qu’il suffisait de développer un peu. Travail prémâché.

Voici ce qu’a écrit L. : « Dans la communication des gueules casser et compliquer car certain on plus de vous plus d’audition car certains se font froler de la par l’oreille cause de balle, explosions. les expression sont dure car dépend on peux pas voir si la personne riguole, souris car le avoir plus de machoir ou autre. Les émotions sont autanst pareil que les expressions car le visages peux être déformer ou le visage et paralyser. Les personne se dise "c’est quoi ça ect…)" la personne et traumatiser, peur, triste. » Je m’arrête là, vous avez compris l’idée. Que dois-je faire avec cela ? Je fais une photocopie du devoir et la transmets à mon directeur pour qu’il comprenne mieux la situation. Je pensais que cela allait le convaincre d’agir, de m’autoriser par exemple à ne plus évaluer L. mais à lui proposer exclusivement des exercices alternatifs et de l’inscrire au CFG. Que nenni ! Suis-je naïve…

Je vous livre, telle quelle, la réponse de mon directeur, reçue par mail - après qu’il eut évoqué « mon cas » en conseil pédagogique, en mon absence, pour dénoncer auprès de mes collègues mon « décalage » : « Je pense qu'il faudrait très rapidement vous mettre en contact avec vos collègues de lycée qui vous diraient que ce travail est celui de 20 % de leurs élèves. Ce contact vous permettrait peut être de relativiser vos exigences au niveau du collège. Je suis bien évidement à votre disposition pour échanger sur ce sujet ô combien essentiel que je pense maîtriser après neuf ans d'expérience en lycée. » Voilà voilà. Le poisson pourrit par la tête, mais aussi par tous ses membres… Ce qui tue l’école, ce ne sont pas seulement les réformes délétères de ministres éphémères, c’est surtout, sur le terrain, l’idéologie délirante de beaucoup de directeurs - et enseignants - qui continuent de croire, comme les communistes les plus extrémistes, que leur idéologie va changer le réel, et qui refusent absolument ce même réel lorsqu’il s’éloigne trop de leur grille de lecture théorique. Pauvre L., qui va être victime de la folie utopiste d’un doctrinaire et d’un système en bout de course.

 

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