On n’y aura évidemment pas échappé, à la sentencieuse lettre de la ministre aux enseignants, couplée à la non moins solennelle minute de silence sans lesquelles un drame national n’en serait pas un. Mais ce rituel, régulièrement imposé aux établissements scolaires sommés de faire pour la circonstance bonne figure, laisse perplexe.
La république et ses valeurs mais lesquelles ?
« L’attentat meurtrier contre Charlie Hebdo – écrit Najat Vallaud-Belkacem – a atteint notre république au cœur. » Effet de style, raccourci commode : car si c’est bien Charlie Hebdo qui était visé, l’amalgame rapide entre l’hebdomadaire et un régime politique que ses journalistes ne portaient pas spécialement dans leur cœur a toutes les allures d’une récupération abusive ; comme, soit dit en passant, ce drapeau tricolore malencontreusement planté devant l’entrée du journal.
On voudrait tuer deux fois Cabu et ses copains qu’on ne s’y prendrait pas autrement. Comme d’habitude lorsqu’il s’agit de faire la morale, la référence aux supposées « valeurs de la république » tient une place de choix dans la lettre ministérielle, dans une formulation qui tourne à l’incantation : « L’école éduque à la liberté (…), l’école éduque à l’égalité et à la fraternité (…), l’école doit plus que jamais porter l’idéal de la république. » Certes, pourquoi pas ? Mais on ne peut s’empêcher d’observer que si les politiques usent et abusent de ces formules oratoires lorsqu’ils en ont besoin, les « valeurs de la république » seraient sans doute de plus de poids si l’on s’efforçait de les faire vivre au quotidien dans la société comme à l’école.