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7 septembre 2013 6 07 /09 /septembre /2013 09:19

L’Arrache-Cœur comme Roman champêtre de Apocalypse du monde horticole

Précisions sur les essences (et le carburant national, sic c’est bien de Boris) qui peuplaient le jardin d’Eden, notamment et en particulier (7)

Je préviens tout de suite les étudiants sensibles, surtout les « gozesses » enceintes de 6 ans, je voulais dire les gozesses enceintes et âgées de 6 ans, qu’elles chaussent des lunettes roses parce  que les scènes qui suivent sont plutôt noires. Le mot « Gozesse » appartient au lexique coluchien, qui aurait mérité d’être pataphysicien.

 

Les diverses variétés de pommes (chapitre important)

On connaît les golden, les canada, les grannysmiths. Mais beaucoup trop de mâles ne font pas les commissions eux-mêmes, ils abandonnent ces tâches à leur femelles, qu’ils appellent des femmes, voire des vierges au tout début, et résultat : leur compte en banque baisse vertigineusement.

Alors Dieu se mit en colère (il était un peu radin) et comme c’était lui le chef, il était au-dessus des lois, alors il ouvrit la grille, et les foutit dehors à grands coups de pompes dans le fion !

 Il en avait aussi contre Adam, qui, en mangeant le fruit défendu, en avait gardé un morceau dans la gorge. Quant à la femme, la nommé Eve, il soupçonnait une débauche zoophile avec  un serpent !

Et c’est comme ça qu’on s’est tous retrouvé en bas.

Une autre explication, plus noble, fait autorité dans les Facultés de Théologie, la voici, il s’agirait d’une mauvaise interprétation sémantique à propos de « malum ». Certains prétendaient qu’il fallait traduire par la « pomme », et d’autres par « l’arbre de la connaissance du bien et du mal » ! Ils en arrivent à la confusion entre le Bien et le Mal. Et, en vérité je vous le dis :

Qu’ils aillent planter leurs putains d’arbustes ailleurs.

 

Mais si, je reviens à l’Arrache Cœur ! Car les arbres du Mal, ça répand toutes sortes de maladies, et après il faut faire appel à Monsanto, à son ouvrier, Mr Round-Up, et c’est encore pire !

 

Les voilà donc sur terre, nos deux abrutis, nos ancêtres et leur descendance…

Avec pas mal de boulot qui les attend.

Car, Clémentine a vu tout de suite les dangers du jardin ! On peut laisser la grille ouverte, c’est grave, les trumeaux se sauvent. Surtout Citroën, le dernier arrivé, déjà en retard à l’école de la vie, dès le premier jour et qui n’a même pas un billet d’excuses.

Mais d’autres dangers guettent les petits salopiots, qui peuvent grimper aux arbres et je vous citerai volontiers un exemple, un seul parce que tout s’enchaîne ! Mais vous prendrez bien un petit apéritif pour vous mettre en forme ?

L’exemple, le voilà : « des cancrelats qui peuvent véhiculer des maladies coloniales, contre lesquelles il n’y a pas de remèdes connus, des aiguilles empoisonnées, cachées là par un médecin assassin, après le meurtre des onze personnes en traitement, qu’il avait amenées à modifier le traitement (leurs économies) en sa faveur… »

Car le danger est omniprésent, chez les hommes qui sont foncièrement mauvais, mais parfois chez les animaux, qui ne valent pas toujours mieux, selon Clémentine. L’idéal de Clémentine est que ses « trumeaux » ne grandissent pas et pour cette raison elle trouve l’exemple des Chinoises, « on leur met les pieds dans des chaussures spéciales. Peut-être des bandelettes. Ou des petits étaux. Ou des moules d’acier »

Elle en arrive à la conclusion suprême : « on devrait faire la même chose avec les enfants entiers… ils sont bien mieux à cet âge-là. Ils n’ont pas de soucis, ils n’ont pas de besoins. Ils n’ont pas de mauvais désirs… »

Sait-elle qu’elle fait allusion alors aux Dieux antiques : Eros et Thanatos ?

Clémentine obéit encore une fois aux leçons du bon docteur Sigmund, elle doit obéir à la pulsion de mort, évoquée dans les « Cinq leçons de psychanalyse ».

Car les enfants en liberté sont impossibles à surveiller, selon elle. Ils doivent retourner à la mère. La mère les a conçus pour qu’ils restent dans son ventre à elle. La naissance est une évasion, un abandon de famille, un abandon de la mère, par manque de surveillance. Une faute ! On sait que dans la civilisation grecque, Eros conduit à Thanatos, et on se tait dans les rangs. Pour cette raison, des enquêtes ont établi des statistiques : 69% des hommes ne pensent jamais qu’ils vont mourir !

Et Clémentine non plus, n’y pense pas ! Elle veut retenir la vie dans son ventre de mère. Plus ou moins consciemment. Dans son jardin à elle.

 

Des mesures sanitaires définitives. (Encore un chapitre important !) La femme phallique

Elle en arrive, dans ce roman terrifiant qu’est l’Arrache Cœur, à vouloir une solution finale adaptée à tout danger. Or la vie elle-même est dangereuse dans sa totalité : « Non, il y a trop de danger à garder des arbres dans un jardin… » et, un peu plus loin : « Il peut se produire tant de choses avec les arbres »…La folie gagne encore, parce que l’imagination de Clémentine est désormais dans la déraison suprême. Une folie furieuse qui voit le danger partout : au niveau de la vue horizontale, des arbres et de l’eau, (les bains sont particulièrement nocifs), mais aussi tout en bas, sous la terre, et même la vue du ciel ne la guérit pas.

 Les quatre éléments, l’eau, la terre, le feu, l’air, qui constituaient, selon les Anciens, la vie elle-même, sont devenus de féroces ennemis, des symboles de Mort

 On ne saurait nommer cette maladie, puisqu’elle est universelle, incurable, sauf pour sa victime : Clémentine.

 Or, et là on voit l’ingénieur génial Boris Vian, prendre le dessus sur le poète génial Boris Vian ! Qui est un génie créateur, qui ne marche pas à la trique, un intermédiaire entre les dieux Antiques et les Hommes.

  Or, Clémentine veut dominer le monde entier. Elle est une femme phallique. Son pouvoir s’étend sur le paysage et sur le monde vivant.

Cette question est très actuelle en 2013. Elle touche un féminisme exacerbé. La Mère revendique le droit d’être le Père. C’est la raison profonde de leur séparation, qui n’est pas une partie de rigolade, comme dans les vaudevilles. D’ailleurs c’est une préoccupation constante dans les romans de Vian : deux couples dans « l’Ecume des Jours » deux couples dans « L’Herbe rouge ». La dissolution du couple permet à l’argent une meilleure circulation dans les circuits bancaires. C’est probablement la cause réelle de ce qu’on appelle l’antisémitisme. Les Juifs forment une caste, dit Céline, et il signale que nous sommes « enjuivés ». Sujet tabou ! Oh là ! là ! Le veau d’or est en question. Cette attitude remonte au moins à la Bible, au livre de Josué !

Mon Dieu, faites que je ne sois pas accusé d’antisémitisme ! Priez ! mes frères ! Tendez la joue gauche et passons la monnaie !

 

Les couples redoublés dans « l’Ecume des Jours », et dans « l’Herbe rouge »

 Vian a tendance à présenter au moins deux couples dans tous ses romans « l’Ecume » :

Chick et Alise. Dans l’Herbe Rouge : Lil et Folavril. Et dans l’Arrache Cœur, le couple se désintègre.

Ainsi en arrive-t-il à refuser, apparemment, la présence du père. Il y a au moins un père de trop dans L’Arrache-Cœur : et tous les deux sont amenés à partir. Tandis que les femmes sont amenées à se poser la question de la prééminence du père. Mais ce n’est pas une exception. L’Herbe Rouge finit sur ce dialogue :

« -Dieu, dit Lil, comment a-t-on pu aussi longtemps vivre avec des hommes ?

-C’est de la folie approuva Folavril… »

On est en plein dans l’actualité de 2013, avec le mariage homosexuel.

Et si l’on ajoute l’essentiel, le mariage de Colin et Chloé, où il n’existe pas de problème de couple, on a au moins les Demoiselles d’Honneur remplacées par les Pédérastes d’honneur, qui portent un pantalon avec braguette à l’arrière…

 On peut même se demander si la complicité entre le Curé et le Sacristain n’est pas une sorte d’idylle homosexuelle violente. Leur complicité donne l’impression d’une forme d’amour divin, qui n’est qu’un décor, une mise en scène, comme ça se pratique encore aujourd’hui, en 2013, alors que les gens ne croient plus en Dieu, comme dans le Village de Vian. Bref tout relève de la Société du Spectacle, montrée par Guy Debord. Tout est spectacle dans l’Arrache Cœur ! Fait pour être vu par des spectateurs.

 A la limite, ils sont interactifs ! Il y a, en effet des échanges verbaux, qui tiennent de la nécessité théâtrale.

 

Un spectacle de luxe !

 Les paroissiens sont des spectateurs (intéressés certes) mais des spectateurs payants. La cérémonie religieuse  est d’ailleurs présentée comme telle :

  « CET APRES MIDI, SPECTACLE DE LUXE » (Page 152 de mon édition en livre de poche (1992 et en 1953, personne parmi les critiques aucun n’avait vu que c’était une œuvre de génie !)

Le monde réel disparaît, car on est dans le virtuel, un demi siècle avant l’événement ! Mais Vian, ingénieur, avait déjà prédit la possibilité de composer des chansons sur ordinateur !

Pour aller vite, et c’est dommage, on pourrait approfondir encore, à partir de ce génie créateur qu’est Boris Vian, intermédiaire entre les créatures surnaturelles et les Dieux ! Il apprend à voler, au milieu d’une faune qui ne ressemble pas réellement, à celle de la Ferme des animaux.

Mais Orwell a ouvert la voie… Nous ne vivons plus que sur les Télécrans de Huxley et d’Orwell.

Effort littéraire considérable de la part de  Vian ! Un spectacle de luxe, pour des  drôles de paroissiens, qui sont coiffés avec des casquettes en « peau de taupe ». Et qui s'expriment dans un langage qui comporte des signes cabalistiques,  comme dans « L'Automne à Pékin », ainsi que le montre l'abondance des accents circonflexes et des trémas, qui paraissent être dépourvus de signification dans aucune langue. Ce sont des signifiants sans signifiés. Ils alimentent le mystère,  qui est constitué de « choses derrière les choses »  (Formule de l'acteur Le Vigan,  acteur génial, halluciné, ami de Céline et qui joue le rôle d'un peintre dans le film « Quai des Brumes ». On peut retenir de lui cette phrase : « quand je peins un nageur, à la fin c'est un  noyé.»

 

Les privilèges de Clémentine : l'emprisonnement des mâles !

Clémentine veut enfermer tout le monde. La discussion avec Jacquemort souvent répétée, est très révélatrice à ce sujet.

Prenons l'exemple de l'enfermement, la cage ou la prison !

A la question de Jacquemort : « Ont-ils besoin de cette protection ? »

La réponse est définititive :

« -Je meurs d'inquiétude toute la journée en pensant à ce qui pourrait leur arriver... seule une mère pourrait me comprendre » dit Clémentine

« -Ca meurt en cage les oiseaux...

« -Ca vit très bien, dit Clémentine. C'est même le seul endroit où on puisse les soigner convenablement. »

 A quoi, Jacquemort ne peut que répondre :

« -Je n'enferme pas les autres...

« -Mes enfants et moi, c'est la même chose, dit Clémentine. Je les aime tant.

« -Vous avez une drôle de conception du monde, dit-il »

« -C'est ce que je pensais de vous. La mienne n'a rien de drôle... le monde, c'est eux. »

« -Non vous confondez, dit Jacquemort. Vous souhaitez d'être le leur. Dans ce sens là c'est destructif...

On pourrait continuer le jeu des dialogues, et on n'arriverait à aucune entente. Mais on comprendrait un problème de société pour employer un lexique rebattu.

 On comprendrait pourquoi les féministes excessives sont à la limite de la folie. Elles adorent, et je parle d'une infime minorité très agissante, elles adorent les professions où l'autorité joue un grand rôle. La maternité leur donne des privilèges. Et, en même temps, le mâle abandonne son rôle. Ainsi s'explique que ce maternage soit aussi sympathique qu'il fait accepter l'autorité de la femme, avec le sacro saint « partage des tâches » !

Jusque là, rien de condamnable

 Mais c'est ainsi qu'on se retrouve avec 68 000 personnes dans les prisons françaises, dont moins de 5000 femmes.

Et en 2013 !

Quel prophète, ce Vian !

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