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17 novembre 2012 6 17 /11 /novembre /2012 09:34

Sous les palétuviers

Ca a débuté exactement comme ça.

Un dimanche d'été, superbe, ensoleillé, avec un piaf accroché à chaque branche !

Vous n'avez peut-être jamais vu. Il faut être natif du terroir. Les petits oiseaux chantent à tue-tête, à gorge déployée même. C'est plutôt con, un oiseau, mais dans ces circonstances, ça crée une ambiance. Ils volètent gaiement, en croquetant les mouches toutes crues au passage.

 Crac ! Encore une !

 Ah que c'est beau !

Les mouches, elles font la gueule, c'est pas qu'elles aimeraient mieux être cuites, mais elles se disent que le Créateur s'est quand même drôlement payé leur tronche, vu qu'elles servent à rien, qu'à nourrir les oiseaux du bon dieu. A la rigueur, à piéger les poiscailles au bout des hameçons... tu parles d'une profession ! Elles ont, c'est bien le moins qu'on puisse dire, des emplois précaires, dans le grand mystère de la Création. Ah c'est bien la peine d'avoir des yeux à facettes pour regarder par derrière sans rétroviseur !

Seulement les mouches on s'en tape, c'est moche vu de près, c'est pas esthétique, il n'existe aucune oeuvre d'art ne représentant que des mouches. En plus, elles se lavent pas régulièrement les pattes, résultat elles ont plein de virus entre les orteils, qu'elles refilent à l'humanité propre.

 Et puis ça se mange même pas, les mouches, du moins dans nos régions. Les piafs, ça se déguste. Ca se mitonne même aux petits oignons. Quand ils sont fatigués de les regarder, au mois de septembre, qu'ils leur ont bien cassé les joyeuses tout l'été, les ploucs vont décrocher leur calibre et ils leur font: "petits petits petits..." Les piafs s'approchent, toujours aussi cons, pas méfiants. Alors ils leur balancent un peu de plomb dans la tête. Ca s'amuse d'un rien, les ploucs.

 Ou ils les étranglent avec des collets, c'est une question de goût.

 Mais aujourd'hui on n'en est pas là. C'est idyllique, ce matin. On dirait l'Astrée, Paul et Virginie, Roméo et Juliette, Manon et Des Grieux, Rivoire et Carré. Fabre d'Eglantine moins la guillotine à la fin. Il pleut bergère, mais rien que la mélodie sans les paroles, vu qu'il fait beau.

 Saisi d'une inspiration rustique, j'entonne "J'ai deux grands boeufs dans mon étable."

Puis je me ravise. Qu'est-ce que je vais en faire, de ces boeufs tout neufs?... j'ai pas d'étable, je suis pas du métier...Tout à fait dans le fond là-bas, derrière un palétuvier, j'aperçois même deux anges qui se tiennent par la main.

 Je dis par la main, je suis pas sûr... attendez, je vérifie... ce serait pas un euphémisme, des fois?... oui, c'en était un ... complètement à poil, ils sont, les anges, alors qu'ils devraient être à plumes ! Et sans les feuilles de vigne... Et du poil, ils en ont, tiens, c'en est indécent, surtout le vieux, avec la soutane relevée...

Vieux sagouin, mais c'est le curé d'Uruffe?... le père Wenceslas?... celui qui bouffe des Tutsis en salade... En tout cas c'est pas des vrais anges. Ah non ! c'est encore un jeune élève de l'école Sainte-Pinette-la-Velue, qui fait sa promenade matutinale en compagnie de son confesseur.

 A propos de vigne, je rêve déjà à la boutanche que je vais m'ouvrir sur le coup d'onze heures. Ca va pétiller sous la tonnelle. Dans ces cas-là, je choisis en principe un vin de montagne. Ca me propulse vers les hauteurs paradisiaques, gratos et sans efforts.

 Il y a des tas d’abrutis qui savent pas que ça existe, les vins de montagne. Ils traversent la Suisse de gauche à droite, ils voient pas une seule vigne ! Ils voient que la colonne d'eau de Genève... C'est vrai qu'elle est plus haute. Mais j'ai remarqué, les cons sont très impressionnés par l'eau.

 Forcément, c'est ce qu'ils ont dans la tête.

Il y a aussi des tas de cons dans des spécialités non vinicoles, mais je vous parle de cette variété là parce qu'elle m'énerve davantage.

Donc, dimanche, l'été, mes contemporains ont décanillé vers les lieux de rassemblement obligatoires. Les grandes concentres d'abrutis. En vacances, ils disent. Ils redessinent la carte de France exactement, mais en vrai, avec les pieds juste à l'endroit exact du bord de la mer... Et c'est pas facile, essayez de dessiner, à l'échelle, le Cotentin, la Pointe du Raz...

Agglutinés tous sur les rebords de l'océan, alignés le long de la grande bleue. L'hexagone s'est vidé de ses habitants, tous précipités au bord des flots ! Tous aux frontières maritimes. Ca dégage un peu les régions plus continentales. Et c'est pas un mal puisque ça dégage aussi les microbes vers l'extérieur. Vous avez remarqué comme ils attirent le virus de l'hépatite B, les vacanciers ? Pendant ce temps-là, on vit dans l'hygiène et le sanitaire, sans le social. Le rêve...

On devrait leur accrocher la médaille des épidémies, à ces mecs. Moi, j'en profite, plus personne autour de ma datcha. Je vous dis pas où j'habite, sinon les gens viennent vous faire chier, alors que j'ai du boulot qui m'attend. Vous encore, ça me dérangerait pas, mais on fait pas gaffe dans la conversation, on lâche l'adresse à la voisine, qui la refile au fils du boulanger, et de fil en aiguille, on se retrouve avec une armada de connards qui piétinent devant la porte. Disons que je suis central. Sans être massif. Un peu au-dessus.

Je me cale bien derrière mon ordinateur et je m'apprête à vous narrer une de ces historiettes qu'on trouve nulle part ailleurs dans le commerce. Ni en gros ni au détail. Vous avez une certaine chance, finalement, de me connaître... et moi, donc!

Je me relis.

Merde. Ca commence comme le Voyage. Je vais pour corriger, re-merde, le téléphone!

Tant pis!... je vous le laisse comme ça, le début, faut que j'aille décrocher. Ce sera à la bonne franquette, entre nous.

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