C’était encore le téléthon et les idées n’avaient pas manqué.
A Suceluy-le-Grovy, en Beauce, une femme avait fait, et tenu, le pari de se remplir la bouche d’une betterave sucrière durant 48 heures!
- C’est pour m’entraîner pour les gâs de la mouesson, avait-elle précisé, bizarrement, en son patois.
A la suite de cet intéressant exploit, FR3 avait filmé deux céréaliers qui signaient un chèque, dont on apercevait presque le montant, un peu flou, cependant, à l’extrême droite de l’image.
A Montreville-les-Cocues, une femme avait été au centre d’une polémique regrettable. Cette généreuse participante avait eu la même idée que la suceluysienne susnommée, mais c’est dans un autre orifice qu’elle prétendait loger la betterave de Beauce.
Un ancien militaire, titulaire de la croix des Violeurs Patriotiques en Mission, avait obtenu que cet exploit, d’un goût discutable, il faut bien le dire, fût annulé in extremis.
Il n’empêche que la Beauce avait fait preuve de beaucoup d’originalité.
Un enfant avait égorgé 32 lapins transgéniques en 28 secondes, un instituteur avait reçu douze gifles en 5 secondes et, en hommage à Jeanne d’Arc, trois rosières avaient défilé en armures sans sous vêtements, par une température de -12,5°.
Les dons avaient été encore plus considérables que l’année précédente et les personnalités les plus célèbres de l’hexagone, celles dont les véhicules étaient constamment protégés par une brigade de vigiles, étaient venues évoquer le thème de la solidarité dans un langage qui avait fait pleurer, disait un sondage du Figaro, 97,2% des Français!
D’autres régions, bien entendu, s’étaient montrées également très généreuses. On citera en particulier cette habitante de Chamonix, qui était allée recoudre les chaussettes de son petit-fils, handicapé moteur, à l’aide de l’Aiguille du Midi et à Minuit pile, par une température de -23°! Un record difficile à battre.
D’une façon générale, les politologues avaient noté que les dons étaient d’autant plus importants que le niveau d’instruction était bas.
- Voilà qui est réconfortant pour nos amis pauvres, disait un ministre, sur TF1.
Et son voisin ajouta, pour conclure avant la fameuse « pause de publicité », car l’émission était fatigante à la longue:
- Les peigne-culs ont du mérite, et ce n’est que justice que l’on honore tous ces merdeux que l’état encule à longueur d’année!
Langage un peu vif, on le voit, mais qui nous change de la fameuse « langue de bois » en vigueur habituellement dans les discours officiels.