Je ne me suis jamais réjoui de la mort de quiconque, mais je reconnais avoir pensé, à l’annonce de celle de Thatcher, à cette phrase de Clarence Darrow : « Je n’ai jamais tué personne, mais j’ai lu beaucoup de nécrologies avec un grand plaisir. »
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J’ai souvent entendu dans mon village des gens être la cible de propos sévères, persiflés pour leur bêtise, leur lâcheté, leur ladrerie ou leur penchant marqué pour la bouteille, mais dont on finissait par dire : « Attention ! Par contre c’est un bosseur ! » Et les langues jusqu’ici bien pendues de se taire, l’outragé de se voir aussitôt réhabilité, rétabli dans sa dignité, son cœur inaltéré, son âme immaculée, sauvée de l’opprobre car lavée aux eaux pures de la besogne et du courage.
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Dans mon village, on peut tout vous pardonner. Tout, sauf de ne pas travailler ! Là c’est le désaveu, la honte, le sacrilège ultime. Le reproche et l’indignation s’abattent sur vous. Vous pouvez bien tuer votre voisin, faire les troncs de l’église ou ne jamais remettre votre tournée à l’apéro : il ne peut y avoir déshonneur pire que celui-ci.
Pensez : un fainéant dans la famille !