Monsieur le Président,
En ma qualité de Sénatrice représentant les Français établis hors de France, je
ne peux que vous remercier des efforts pour obtenir la libération de notre
compatriote Florence Cassez. Sa condamnation repose sur une enquête
manipulée et elle est de toutes façons disproportionnée au regard des faits
délictueux mal établis.
Son cas rappelle celui de Salah Hamouri, condamné pour avoir envisagé – ce
qui n’a jamais été prouvé – d’attenter à la vie d’Ovadia Yussef, chef du Parti
Shass. Salah avait 18 ans à l’époque. Il en a aujourd’hui 25.
Monsieur le Président, vous vous êtes engagé publiquement à porter
assistance à tous nos compatriotes et cela « quoi qu'ils aient fait ». Votre
soutien renouvelé à Florence Cassez illustre bien cet engagement. Je ne peux
que m’associer à cet engagement. Cependant, il me semble que votre action
gagnerait en lisibilité si elle reposait sur les valeurs universelles de respect des
droits de l'homme et que vous les appliquiez avec la même fermeté partout
dans le monde. Vous avez reçu dix fois les parents de Florence Cassez mais
vous avez toujours refusé de recevoir les parents de Salah Hamouri.
La différence de traitement s'explique par plusieurs raisons. D'une part les
liens politiques que vous avez établis avec l'Etat d'Israël vous conduisent à
vous aligner sur les positions de ce pays quoiqu'il fasse. D'autre part, vous
estimez, très certainement à juste titre que la justice mexicaine obéit, dans le
cas de Florence Cassez, à des motifs très éloignés de la recherche de la vérité
et de l'équité. En ce qui concerne Salah Hamouri, vous feignez de croire qu'un
tribunal militaire des forces d'occupation israéliennes a mené une enquête
approfondie et a jugé en droit. Comme l'écrivait Clemenceau, « un tribunal
militaire est à la justice ce que qu'une fanfare est à la musique ». Les tribunaux
militaires israéliens dans les territoires occupés font de la pure répression et ne
rendent pas la justice le moins du monde. En fait, Salah a dû accepter le
chantage du "plaider-coupable", comme 90% des prévenus palestiniens, pour
être enfin jugé après plus de 20 mois de détention et pour voir la peine de
quatorze ans de d’incarcération dont il était menacé être divisée par deux.
Son dossier d'accusation est vide de tout acte délictueux. Son seul crime est
d'avoir été un adolescent remuant, révolté par l'oppression et les injustices de
l'occupation militaire. Son cas a été aggravé aux yeux des forces d’occupation
par son adhésion au FPLP, parti représenté au Conseil national palestinien.
Membre du comité de soutien de Salah, je l’ai rencontré en juin dernier et
peux témoigner que son injuste incarcération augmente sa force de caractère,
sa soif de connaissance et sa générosité. Par sa mère, professeur de Français à
Jérusalem, Salah est Français. Mais par son père, Salah est un arabe
palestinien : cela le rend certainement, à vos yeux, fort peu digne de la
protection du seul pays dont il ait la nationalité, la France. Les citoyens
français sont égaux mais Salah est moins égal à vos yeux que Florence.
Salah Hamouri devrait être libéré en novembre prochain. Allez-vous enfin,
Monsieur le Président, recevoir ses parents et porter assistance à ce jeune
Français de 25 ans ?
En espérant que vous prendrez les décisions qui s'imposent en faveur de Salah
Hamouri autant que pour Florence Cassez, et en vous remerciant de votre
attention, je vous adresse, Monsieur le Président, etc.