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11 janvier 2014 6 11 /01 /janvier /2014 09:55

Ah ! bien ça y est mon co-auteur plonge dans l’histoire ! Il relie le présent au passé dans une dialectique parfaitement conforme aux travaux des historiens et sociologues les plus pointus et les plus vendus de tous les éditeurs, les plus vendus, les éditeurs de merdre donc, pour conclure.

 Le voilà qui remonte l’arbre généalogique des Lenoir, mais à l’envers. Le commissaire Naze, du coup, ne sait pas trop comment le prendre, l’arbre généalogique. Il est en proie à un cas de conscience, et un commissaire de police avec un cas de conscience, ça lui fait comme des ganglions au-dessous du cou. Ca enfle, je veux dire. Et, il a pas tort, Naze. Prenez un arbre généalogique. Posez-le sur la table du commissariat, je vous donne l’autorisation.

 Ici, tout de suite, on se trouve face à un premier problème, apparemment simple, mais attendez. Par quel bout le prendre, l’arbre ? Il est là, sur la table du commissariat, magnez-vous un peu. Oui comment le prendre ?

Par les racines, en principe, puisqu’il donne les ancêtres avec leur identité exacte. Et pourtant, c’est plus souvent par les branches, que les généalogistes le prennent. Ils grimpent dans l’arbre, c’est plus facile, mais c’est parfaitement illogique. Par exemple, dans ce cas précis autant que brionnais, mon co-auteur a raison, pour une fois. Les Lenoir, dont auxquels il cause, il faut les regarder par en-dessous. Même les gonzesses ? Même les gonzesses ! C’est pas bien poli, je sais mais aussi pourquoi elles vont se jucher sur des branches, ces dindonnes ? Et puis y en a une bande. Forcément, depuis 1796, que le crime a été commis ! Notez, et je suis encore d’accord avec mon co-auteur, les Lenoir, ils valaient pas cher. Comme on disait à Brion, « y en a pas pour ben de la monnaie. » Y sont jaloux, et, en plus y veulent rendre les autres comme eux.

Le père Lenoir, il a inventé le nom de son auberge : « La Jalousie ». C’est une provocation ! Par le fait, il est responsable de ce qui lui arrive. Et même de ce qui arrive aux autres, qui sont devenus franchement mauvais… Il existait pourtant beaucoup d’autres noms à la  con, comme Chassepain, la Fontaine du Cul du Chien, la Fontaine de Sans Cul. Mais ça produit aucun effet sur les voisins. Ca les rend pas haineux. Tout au plus, ça les fait ricaner.

 Le commissaire Naze est perplexe. Il sait pas trop ce que le mot veut dire, alors aidons-le. Il est pensif. D’ailleurs, il l’avoue lui-même :

-« Je suis pensif… pas loin d’être perplexe… patience, j’apprendrai le mot demain… »

Je vous le disais. Je raconte pas que des conneries.

Il ajoute, le commissaire Naze :

-« C’est une affaire tellement ancienne, qu’il y a plus de témoins vivants… sinon on pourrait les faire causer, avec une bonne garde à vue… mais dans le cas qui nous occupe, c’est une garde à perte de vue qu’il faudrait… et c’est pas prévu par le règlement… »

Pas si con qu’il en a l’air, ce Naze ! Il essaie de se remémorer les noms des antagonistes. Il se plante encore un peu dans les mots, il veut dire « protagonistes » mais il est pas sûr de lui. Alors il hésite à se lancer dans le lexique un peu duraille.

 (Naze, il dit pas « duraille » il comprend « du rail » son papa il était à la SNCF.  Faut pas trop l’accabler non plus, le commissaire).

 En tout cas, il raisonne très finement. Résoudre un crime aussi ancien, ça nécessite des recherches historiques. Et de l’intelligence, de la finesse, un raisonnement sans faille, une mémoire d’oliphant (je vous le disais, il est encore hésitant, question vocabulaire).

 Pendant ce temps-là, mon co-auteur, il le renseigne un peu, parce que s’il connaît pas la suite de l’histoire, on y sera encore à la Saint Trou du cul, et il faut que ce soit lui, le commissaire Naze, qui détricote l’écheveau très compliqué de cette sombre histoire, donc mon co-auteur lui donne un petit coup de main, il est généreux, il sait qu’il faut aider les pauvres d’esprit et il sait qu’il y en a beaucoup dans la police qui fait des enquêtes.

« Outreau, c’est trop » qu’il a l’habitude de dire. Et je l’approuve.

 Les Lenoir, donc ils ont déteint sur la vieille population innocente qui vivait jusqu’alors paisiblement à l’ombre de son signal, à Brion (altitude du signal : 223 mètres). Ils l’ont rendue hargneuse, la population. Jean Pierre le boucher, Claude qui vote à gauche, Jacky le pédéraste, Jean Yves et son teckel, Dédé le Fier… Ils se promènent tous, la hache à la main, c’est devenu une seconde nature, l’obsession de la hache. A titre défensif d’abord, puis pour faire régner la terreur face aux Lenoir d’aujourd’hui, qui rôdent derrière les poulaillers, qui pourraient les attaquer en pleine nuit. A titre préventif, certes. Mais si on passe à la hache tous les criminels, avant qu’ils aient commis leur crime, alors l’enquête est même pas nécessaire… Mais il y aura beaucoup plus d’erreurs judiciaires.

 D’autant plus que les descendants des Lenoir ont rebaptisé leurs auberges avec des noms qui résonnent comme des provocations au meurtre. Alors, ça se comprend, ils appliquent le principe de précaution. Ah ! Non ! Ils vont pas se laisser faire comme dans la Seine Saint-Denis. Allez je vous donne les noms de baptêmes de leurs établissements ! Les voilà, patience, poussez pas. Il y a « L’Envie », « La Tortuserie », « Le Grand Riche », « Le Grous Doumaine », « Les Pleins Silos », « Les Comptes Archipleins », « La Calomnie », « La Gourmandise », « La Haine », « Le Dépit », « Les Envieux »… D’accord, c’est pas malin de provoquer ainsi les pauvres et les mauvaises gens, qui trouvent que, soi-disant, y en aurait trop qui sont milliardaires par rapport aux crève-la-faim.

 N’insistons pas sur la profonde malignité de ces misérables, qui n’ont qu’une idée, c’est d’attaquer les ceusses qu’ont réussi par leur travail et qu’ont bien raison de chier sur la gueule des peigne-culs, qui se lavent même pas sous prétexte qu’on leur a coupé l’eau, l’électricité, le gaz, et forcément ils puent en plus, alors comment voulez-vous qu’on les prenne pour des êtres humains ?

 J’en étais là, de mes pensées, comme dit George Sand dans la Mare au Diable, lorsque mon attention fut attirée par un spectacle charmant et fort bucolique.

 Un homme encore jeune, équipé d’une longue gaule, criait en direction de deux bœufs puissants et fraîchement liés (et après n’allez pas dire que je méprise la Georgette !). Il était accompagné d’un jeune enfant de six à sept ans, vêtu d’une peau d’agneau, comme un Saint Jean Baptiste (ou un singe en batiste, ça marche aussi, croyez-vous qu’elle va porter plainte pour plagiat, Georgette ? ) tout droit sorti de la toile d’un peintre du dimanche et de Nohant, par la même occasion.

 Je reconnus dans cet homme musclé à souhait, enfoncé dans un pantalon moulant très érotique, disons charnel, je reconnus qui ?

 Je vous laisse frémir un instant.  Ca y est, vous êtes à point ?

 Je reconnus d’abord mon erreur. Car ce n’était point un aiguillon avec lequel il eut pu mener des bœufs au labour ! C’était une hache qu’il brandissait élégamment à tel point que j’en fus jaloux. Comme étaient jaloux, les brionnais  devant « La Jalousie » du père Lenoir en 1796 !

 Et je reconnus aussi deux femmes de Brion, bien en chair il faut dire. Mais quoi, je n’eusse point dû les confondre avec des bovins, ces deux grosses vaches ! Elles étaient attelées à une charrue, selon la coutume du Berry et le personnage équipé de sa hache était…

 Je vous le donne en cent, je vous le donne en mille ! Etait donc, mais vous avez deviné car vous êtes perspicace… le personnage était mon co-auteur !

Ni plus ni moins. Il s’était entraîné à découper les femmes dans le sens de la longueur.

Je l’interpellai :

-« Hey ! » lui dis-je, pour montrer que je n’étais pas beaucoup plus con qu’un autre. « Où vas-tu, Gitan ? » Sa réponse fut immédiate : « Je m’en vais au travail !... je fabrique des femmes ou plutôt, je les multiplie comme nous avons appris ensemble au début de ce polar… Je travaille au noir, il me faut de l’argent de poche… »   Je le félicitai et je lui souhaitai bon courage pour la prochaine livraison de ce polar brionnais.

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