D’abord je vous préviens, je vais vous parler d’un livre. Un livre ? Avec des images ?
Non, un livre avec des caractères d’imprimerie ! C’est nouveau à l’heure actuelle.
En plus c’est une autobiographie et on appelle ça une autofiction depuis quatre ou cinq ans. C’est pas un bon mot, ça suppose que le type qui raconte sa vie, c’est un tricheur ou un gâs qui sait pas écrire, et bon Max Ploquin sait écrire ! Pourtant il est médecin ! Vous vous souvenez, autrefois, je parle ici pour les vieux qui n’en finissent pas de rendre leur dernier soupir, les vieux qui font la gueule, sous prétexte qu’on leur a donné la vie, ils aiment pas le moment où l’on veut la leur retirer ! Des mauvais coucheurs, des mauvais moureurs.
Attendez-vous pas à ça avec Max, c’est un moureur marrant. Et puis je vous donne le titre en entier :
Aventures
D’un toubib de campagne
Et accoucheur
Dans le Berry de George Sand
Les ordonnances autrefois on ne pouvait pas les lire. On disait que les médecins le faisaient exprès pour que les ploucs ne comprennent pas. Seul, le pharmacien parvenait à les décrypter. On sentait qu’ils étaient de mèche, tous les deux. Alors on disait à la campagne : « c’est du latin ».
Eh bien ne vous attendez pas à des ruses comme ça ! Max Ploquin est le plus honnête des médecins, il ne fait pas d’ordonnances, il fait des accouchements sans douleur. Et il dit comment il faisait, à la campagne précisément pour rassurer les femmes, qui éprouvaient un peu d’appréhension avant cet acte qui arrivait forcément un jour ou l’autre.
Mais je vous rassure tout de suite, Max ne nous raconte pas que des accouchements, sinon on s’ennuierait à la longue avec tous ces nourrissons qui sortent, si je puis dire à la queue leu leu du ventre de leur maman. C’est pas qu’on n’aime pas les enfants, mais quand même il faut se modérer, sinon Saint Denis de Jouhet aurait été la plus peuplée des villes du centre de la France ! Les Parisiens auraient été jaloux, peut-être même les Tourangeaux !
Mais je sens bien que vous voudriez en savoir davantage ! Vous voudriez que les femmes souffrent un peu ? Et Max il dit « niet ! » Vous avez pas souffert, vous, en les fabriquant ! Alors je vous donne des titres de paragraphes, qui décrivent la vie à la campagne vers 1960. Il s’attendrit, Max, il ne juge pas les comportements. Par exemple, je vous conseille le chapitre : « Mario, ses escargots, ses fraises des bois, ses emmerdes ». Non vous n’en saurez pas davantage. C’est émouvant, c’est tout. C’est l’histoire d’un petit gosse, pas trop riche... non je vous dirai rien de plus. Il parle aussi de l’épicière, de la boulangère, et, surprise ! de l’artiste Guy Baudat, fils de potier génial… Il nous parle des films de naissances, c’est un artiste, Max, un artiste utile. Il nous parle des cochons, des chèvres, et des histoires de Nénesse. Il réhabilite les paysans, leur bon sens, leur philosophie. Il ne néglige jamais les petits coups de rouge, de gnôle, de Champagne aussi, parfois sans modération. Et ses paysans sont instruits, ils sont au courant de l’actualité, on y évoque aussi la mort de Gérard Philippe, de Boris Vian, du « Déserteur », et Max n’omet jamais de rappeler la Résistance, la Guerre d’Algérie, dont le malheur frappe à distance, et puis sa grande passion pour le football. Figurez-vous qu’il y a un terrain vraiment trop pentu ! Très éloigné des normes exigées pour les matches officiels. Il raconte l’histoire de l’enfant tombé dans la fosse à purin, celle du coq abattu à la carabine… Rassurez-vous, Max n’est pas méchant ! C’est sur la girouette du clocher qu’il s’est entraîné au tir à la carabine !
Je passe sur beaucoup de situations cocasses, drôles, et sur d’autres qui auraient pu tourner à la tragédie… qui ont tourné à la tragédie comme cette femme qui accouche le même jour que son voisin meurt en Algérie. L’étrangeté de la vie apparaît alors dans sa profondeur…
Mais faites-vous une idée vous-même. Ce sont les couleurs de la vie que vous verrez dans ce livre d’autant plus littéraire qu’il ne cherche pas à l’être.
C’est un ouvrage populaire mais aujourd’hui on n’oserait plus dire « populiste » et c’est dommage. Le populisme fut un mouvement littéraire qui visait à mettre en scène le peuple dans des paysages où vit le peuple des campagnes, la sagesse des paysans, que Max Ploquin a si bien évoquée. Non, les paysans de Saint Denis de Jouhet ne sont pas les arriérés que les habitants des villes ont souvent décrits avec mépris.
Nous sommes tous, ou presque, issus des paysans de Saint Denis de Jouhet.
Le livre est disponible en librairie. 21 €
Ou par correspondance : Editions de l’Impossible. B.P.321 - 78 703 Conflans CEDEX.
21€ + 4€
Une présentation du livre aura lieu le 21 décembre 2012 à la Brasserie « Le Mazagran » à partir de 18h30-19h…