JE ME SOUVIENS
Je me souviens de Billancourt
Du catalogue de Manufrance
La deux chevaux qu’arrive dans la cour
On disait qu’on était en France
Les gendarmes roulaient les « r »
Dans des films qu’étaient pas de Godard
Mais ils avaient l’air débonnaire
Pas d’alcootests et pas de radars.
On était dans un hexagone
Mais on le savait pas vraiment
On s’ fichait bien de la couche d’ozone
Du climat et du réchauffement
Maint’nant c’est plein de climatologues
Et de nanas pour la météo
Mais comme m’a dit un flicologue
Le flic devient de plus en plus chaud.
ça se réchauffe c’est pas discutable
Mais ce chaud-là fait froid dans le dos
La chaleur est moins agréable
Dans les prisons les camps d’ados.
Je me souviens c’est pas si vieux
La rue l’hiver chaud les marrons
Je sais pas trop si c’était mieux
Mais l’ Tour de France tournait en rond
Je me souviens Delon Gabin
Tous ces voyous bien sympathiques
Ils perdaient pas d’ temps au turbin
Mais ils savaient tirer du fric.
C’était pas des chèques qu’ils tiraient
C’était en général des flics
Haut-les-mains se disait en français
On n’était pas en Amérique.
Je me souviens du premier mai
Quand l’ muguet était communiste
Le p’tit vin blanc sous la ramée
L’ivrogne qui tanguait sur la piste
Je m’ souviens d’ la DS 19
Du dix mai de l’intelligence
Le jour qui se levait tout neuf
On disait qu’on était en France.
C’était il y a longtemps hélas
Dans une époque surannée
Et quand je cherche sur l’atlas
Maint’nant je m’ demande où l’on est.
BAC + 30
Ça commence par un cri sur un lit d’hôpital
J’me souviens plus très bien mais paraît qu’ ça fait mal
Juste après c’est le pacage et c’est déjà les grilles
Et les postillonnages de toute la sainte famille
Comme il ressemble à son père, comme il ressemble à sa sœur
Comme il ressemble au plombier, comme il ressemble au facteur
Comme il ressemble à mon cul d’ailleurs ils sont fêlés
Ils me passent tous les produits qu’ils voient à la télé.
Comme dit le cousin qu’ a bac plus trois
Si j’aurais su qu’ ça soye comme ça
Et qu’ le contrôle soye continu
Pour sûr que je serais p’t’être pas venu.
Ça continue très fort ils font l’ coup du baptême
Avec les p’tits angelots qui barbotent dans la crème
Juste après c’est le pacage et l’école communale
Ça j’ m’en souviens très bien je suis sûr qu’ ça fait mal
On voudrait bien s’ barrer mais y a toujours les grilles
Et les postillonnages de toute la sainte famille
Qui mate le p’tit génie d’un œil assez inquiet
Vu qu’il est quatrième derrière le charcutier.
Comme dit ma nièce qu’ a bac plus neuf
Qu’ est infirmière à Bourganeuf
Si j’aurais su qu’ ça soye pareil
J’aurais potassé la loi Veil.
Faut pas croire qu’ c’est fini les vacheries et d’ailleurs
Ils t’ balancent à l’usine au bureau ou ailleurs
Un truc où tu es garé sur un genre de parking
Et c’est ton tour à toi de beurrer tes tartines
On voudrait bien s’ barrer y a des jours on s’ le dit
Mais qui c’est qui paiera ta petite mort à crédit
Et la maison aussi avec autour les grilles
Pour empêcher le retour de toute la sainte famille.
Si j’aurais su qu’ ça soye si dur
Et qu’ la vie ça soye de l’ordure
Comme dit ma tante qu’ a bac plus trente
Je me serais placée en file d’attente.
Ça finit dans un cri sur un lit d’hôpital
J’imagine pas très bien mais je crois qu’ ça fait mal
Juste après c’est l’ pacage et c’est toujours les grilles
Sous les postillonnages de toute la sainte famille
L’avantage cette fois-là c’est qu’on les revoit moins
Sauf pour le chrysanthème juste à cause des voisins
Ah regarde la photo comme il ressemble à son père
Y a toujours une vacherie mais quand on est sous terre.
Comme dit l’ voisin qu’ a bac moins une
On vient au monde c’est pour des prunes
Et vu la rime qu’on attend là
On pouvait redouter pire que ça. (bis)
J'AIMERAIS TANT
J'aimerais tellement chanter français
De ces vieux airs charmants et frais
Où l'on cogne sur la gueule des flics
En leur chantant que c'est des bourriques
Chanter clairement sans les tamtams
Sans les bongos les maracas
Sans rien cacher sous tout ce ramdam
Ces tambourins qui nous les cassent.
J'aimerais tellement chanter gaulois
Des belles chansons sans foi ni loi
Où l'on jette un paquet d'ordures
Au nez de la magistrature
Des choses très simples que l'on comprenne
Qu'on se met tout de suite à fredonner
Quand on est de Villeneuve la Garenne
Né dans les roses de Fontenay.
J'aimerais chanter sous les tonnelles
De ces anciennes ritournelles
Où l'on fait la révolution
Sans demander l'autorisation
Aux spécialistes des Droits de l'Homme
Ceux qui viennent au bout de la chanson
Parce qu'ils ont le bon curriculum
Vous ramasser tout votre pognon.
J'aimerais tant la rouge rose
Les armistices qu'on arrose
Du jus des treilles de Paris
Quand le vin au vin se marie
Pour un mariage pas catholique
Où l'on invite pas ses parents
Mais des copains plus sympathiques
Qu' ont pas la Bible ni le Coran.
J'aimerais chanter ce qu'est inchantable
Dans ce pays de cons lamentables
Où l'on balance à la poubelle
Une belle histoire aussi rebelle
Hugo, Jaurès et Maupassant
Vieux communards rouges de sang
Anars, gavroches et conjurés
Le dos au mur des Fédérés.
CHANSON CANNIBALE
Vous les enfants des favellas
Qui crevez de faim sur leurs ordures
A Rio ou à Brasilia
Il y a trop longtemps que ça dure
Vos chiens de garde on va les soigner
Un coup de maillet sur le cabochon
Vos chiens de garde on va les saigner
Comme on fait quand on tue le cochon.
C’est la berceuse des crève la faim
La douce chanson cannibale
On les bouffera tous à la fin
Ce sera le banquet final.
Vous qu’on embauche et qu’on débauche
Vous qu’on transporte et qu’on déporte
Un coup à droite un coup à gauche
Vous qui ne connaissez que la porte
Vos chefs on va les attendrir
Comme on fait avec le beefsteak
Et puis on les regardera frémir
Quand ils seront dans nos assiettes.
C’est la berceuse bienheureuse
La douce chanson cannibale
Ah ! que la viande est savoureuse
Quand c’est celle du banquet final.
Allez choisis bien ton morceau
Veux-tu la queue ou les oreilles
On aura pour tous ces salauds
Des élégances ministérielles
Pour moi ce sera du Boutin
Moi du ministre en marmelade
Moi du Fillon ça fait plus fin
Avec un rien de Rama Yade.
C’est ma berceuse préférée
La douce chanson cannibale
On va bouffer toute l’Elysée
C’est la berceuse électorale.
FERMER SA GUEULE
Quand on est pauvre on ferme sa gueule
On s’ retire dans son coin tout seul
Quand on est pauvre il faut s’ cacher
On empêch’rait l’ marché de marcher
Il faut retourner chez sa mère
A l’extrême rigueur sous sa tente
Faut qu’ ça brille bien et qu’ ça clignote
Qu’elle sorte au moins d’ chez Don Quichotte.
Quand on est pauvre on ferme sa gueule
On a au moins l’ plaisir d’être seul.
Quand on comprend on ferme sa gueule
On rumine dans son coin tout seul
On voit les cons qui vont s’ach’ter
Pour l’ plaisir d’être surendettés
Deux trois 4x4 et cinq télés
Leurs quinze divorces bien enfilés
Ils suivent les pros de la parlotte
Après ils vont chez Don Quichotte.
Quand on comprend on ferme sa gueule
On les laisse se démerder seuls.
Quand on est moche on ferme sa gueule
Avec ses pauvres yeux d’épagneul
Ou bien alors on est très “in”
Bien barbelés par les piercings
On redevient douc’ment cannibale
Un os dans le groin ou bien à poil
Et puis après on va voter
A chacun ses spécialités.
Quand on comprend on ferme sa gueule
On les laisse se démerder seuls.
Quand on est mort on ferme sa gueule
On sait même plus qu’on est tout seul
On r’garde pousser les chrysanthèmes
On les écoute vous dire je t’aime
Y a pas d’ regrets assurément
On est casés séparément
Alors on garde la gueule bien close
Il est grand temps qu’on se repose.
Quand on comprend on ferme sa gueule
On les laisse se démerder seuls.
LES TRENTE GLORIEUSES
Petites filles des années cinquante
Dans votre usine pas marrante
Vous quittiez votre école à peine
Pour le hurlement des sirènes
Le bonheur tenait à une lettre
Qui voyageait à bicyclette
Quand l’Algérie c’est le bas d’ la France
Les mots d’amour restent en souffrance
C’était dit-on les trente glorieuses
Mais la gloire était laborieuse.
Jeunes femmes de l’an soixante-trois
Cet hiver-là il fit très froid
On avait ressorti l’abbé Pierre
Pour qu’il fasse peur à la misère
ça coûte moins cher que la justice
Aux gros ça demande pas de sacrifices
Mon dieu mon dieu comme ça passe vite
Voilà maint’nant mai soixante-huit
Les enragés les pétroleuses
C’était dit-on les trente glorieuses.
Mais droite ou gauche vers où ça penche
Voilà le pétrole qui prend sa revanche
ça fait un choc et ça bouscule
Cette fois on la prend la pilule
Mais c’est trop tard en vérité
Pour dire maman faut avorter
Des années tu en as quarante
Petite femme des années cinquante
Et les cités sont moins radieuses
Elles sont finies les trente glorieuses.
Pauvres femmes de l’an deux mille
Qu’on a sauvées d’ la dictature
De Karl Marx et d’ la guerre civile
Vous êtes lâchées dans la nature
Aux ordres d’un maqu’reau pas fin
Venu du monde libre enfin
Et qui vend à tous les carr’fours
Votre corps selon l’ cours du jour
Vous tendez vos mains quémandeuses
A la santé des trente glorieuses.
Mais attendez que ça se réveille
Les pauvres n’ont jamais sommeil
On croit qu’ils dorment assurément
Seulement voilà ils font semblant
Tous ceux qui n’ont plus rien à perdre
Un jour vous foutront dans la merde
Ce sera la vôtre assurément
Celle qui pollue si tranquill’ment
Vous verrez vos idées merdeuses
C’est celles-là même des trente glorieuses.
LES YANKEES
Heureusement qu’il y a les yankees
Car les yankees c’est des gars qui
Ont toujours été des pionniers
Pissent dans la bouche des prisonniers
Vu de loin ça paraît facile
Mais pour viser faut être habile
Surtout qu’ y a des arabes derrière
Qui canardent avec des lance-pierres
Ils ont douze ans déjà pervers
Comprennent rien à la vraie guerre
La guerre suffit pas qu’on s’étripe
On humilie avec la bite.
J’adore quand ils passent à l’attaque
Que ce soit l’ Koweit ou l’Irak
On s’ dit qu’on va bien jubiler
Le sang va être rouge à la télé
Sans les yankees ce s’rait terrible
On verrait des villages paisibles
Avec des ploucs et des chameaux
Qui se regard’raient sans se dire un mot
Des scènes comme ça c’est pas souhaitable
ça fait des reportages lamentables
On s’ retrouve dix siècles en arrière
Sans le moindre correspondant de guerre.
On s’endormirait comme des boeufs
D’vant ces images de cons heureux
Car c’est un phénomène notoire
Les gens heureux n’ont pas d’histoires
N’ont pas d’histoires à raconter
N’ont même pas de morts à compter
C’est le genre vraiment anachronique
C’est du malheur sans statistiques
Heureusement qu’on a les yankees
Sans le miracle des technologies
Pas d’ cadavres en technicolor
On s’ ferait chier comme des rats morts.
LE DESERTEUR TROISIEME VERSION
Monsieur le Président
Je te fais une lettre
Que tu liras peut-être
Si ça t'en laisse le temps
C'est pas qu'elle soit très longue
Mais elle dit c' qu'elle veut dire
A la portée d' tout l' monde
Le truc, c'est de l'ouvrir
Car je m' suis appliqué
C'est pas l' genre qu'on salope
Elle est sophistiquée
Surtout à cause d' l'env'loppe.
C'est une lettre urgente
J' te l'envoie au prix fort
Au moins cinq francs cinquante
J'ai fait un bel effort
Monsieur le Président
Quand ça va exploser
Y aura plus d' Président
Et plus guère d'Elysée
Peut-être plus d' Matignon
D'Ambassade amerloque
Plus d' vigiles à pognon
Que des larbins en loques.
Je viens juste de t'entendre
Paraît qu' t' aimes bien les squats
Y a moyen d' s'entendre
Moi j'adore ton appart'
Monsieur le Président
Tu m' piégeais pour sept ans
Tu vois j' suis pas méchant
Moi j' te piège qu'un instant
C'est vrai, j'écrivais guère
Lorsque j'étais prolo
Mais j'ai la plume légère
Maint' nant qu' j'ai plus d' boulot.
Monsieur le Président
Faut obéir aux lois
Je suis accommodant
C'est une idée ma foi
C' qui fait mauvais effet
C'est d' voir ceux qui les font
Faut voir comme ils sont faits
Dans ton Palais Bourbon
Quand ils tournent en bourriques
Tes vieux chevaux d' retour
Il faudra qu' tu m'expliques
Ils logent au Luxembourg.
Moi j' loge Palais des Cons
Devant l'A.N.P.E.
On est plusieurs millions
Tous à la queue leu leu
Je te fais une lettre
Excuse si j' fais des gaffes
J'ai pas pris mes lunettes
Y a des fautes d'orthographe
Mais c'est fou c' qu'on progresse
Quand y a des résultats
Je vais chercher l'adresse
De tous les chefs d'Etats.
Tous les curriculums
Qu' j'envoyais aux patrons
J'écrivais comme une pomme
C'était beaucoup trop long
Maint'nant je sais faire bref
Y aura pas d' fioritures
Je suis un S.D.F.
Qu'aime la littérature (bis).
PETIT LOUIS (chanson pour Louis Lecoin)
Si vous tuez deux ou trois personnes
En principe on vous emprisonne
Si vous en tuez deux trois millions
On vous refile une décoration
Condamné ou félicité
C'est une question de quantité
Toi Petit Louis t'es pas dans l' coup
T'as pas voulu prendre les armes
T'as pas voulu en tuer du tout
Ils t'ont mis douze ans en cabane.
Le sort a de ces ironies
Pour Petit Louis.
Quand on baptise un monument
Un boulevard ou une avenue
On lui donne généralement
Le nom des tueurs les plus connus
Un colonel un général
Dont le nom sent bon le sable chaud
ça vous remonte le moral
Le matin pour partir au boulot
Mais j' vois avec mélancolie
Qu' y jamais le nom de Petit Louis.
Le sort a de ces ironies
Pour Petit Louis.
La mode revient aux militaires
Aux soudards et aux traîne-rapières
La panoplie de l'assassin
S'épanouit dans les magasins
Du côté d' Saint-Amand Montrond
Ton nom ne dit plus rien à personne
Le maire s'appelait Maurice Papon
C'est le matraqueur de Charonne
Moi j' redis le nom de Petit Louis
En contrepoint à la connerie.
Le sort a de ces ironies
Pour Petit Louis.
CHANSON POUR RAYMOND ET GABRIEL (affaire Mis et Thiennot)
ça s’passe il y a trente ans c’est une histoire ancienne
Cet homme qu’on avait dans un champ trouvé mort
Je voudrais en parler sans colère et sans haine
Pourtant quand j’y repense mon poing se serre encore.
Il paraît que l’on est tous égaux sous l’ soleil
Moi j’ vois bien qu’il brille pas pour tout l’ monde pareil
Ca dépend qui l’on est et comment on s’appelle
Allez le demander à Raymond et Gabriel !
Quand elle est appelée au secours des puissants
La justice est habile à saisir des coupables
Elle en a trouvé huit qui passaient simplement
Des gens comme vous et moi
En tout point vos semblables.
Il paraît que l’on est tous égaux sous l’ soleil
Moi j’ vois bien qu’il éclaire pas tout l’ monde pareil
Ca dépend où l’on est et comment on s’appelle
Allez le demander à Raymond et Gabriel !
Sous les coups les injures ils ont tenu six jours
Six jours sans rien manger sans dormir et sans boire
Et les gens qui passaient soudain devenus sourds
Rentraient vite chez eux pour n’en pas trop savoir.
Il paraît que l’on est tous égaux sous l’ soleil
Moi j’ vois bien qu’il cogne pas sur tout l’ monde pareil
Ca dépend qui l’on est et comment on s’appelle
Allez le demander à Raymond et Gabriel !
Au mur de la mairie dans la salle à côté
Tandis qu’on injurie et que pleuvent les coups
On peut lire bien haut le mot « fraternité »
Ils ont tous avoué comme vous auriez fait vous.
Il paraît que l’on est tous égaux sous l’ soleil
Il est bien temps qu’il brille pour tout l’ monde pareil
Qu’importe qui l’on est et comment on s’appelle
Voilà ce que vous disent Raymond et Gabriel.
LA SEINE ET OISE
Quand nous vivions en Seine et Oise
Paris était près de Pontoise
On voyait passer la marine
Dans le port de Sainte-Honorine
Et le soleil en jouant sur l'eau
Faisait jamais d'ombre au tableau
Sur les tournesols de Vincent
Les saules pleurent en y pensant.
Maint'nant j' vis dans le code postal
Soixante-dix-huit mille sept cents
Et quand les chiffres se décalent
L'ordinateur est pas content.
Quand nous vivions en Seine et Oise
J' revois l' printemps qui s'apprivoise
Près des vergers parés tout fiers
Pour le mariage des deux rivières
Et le soleil en jouant sur l'eau
Faisait jamais d'ombre au tableau
Le vent s'attardait en passant
La Seine rêvait à Maupassant.
Maint'nant j' vis dans le minitel
Et quand j' veux voir la fleur des champs
Suivant l' tarif des télétels
Le prix s'affiche sur l'écran.
Quand nous vivions en Seine et Oise
Dans cette banlieue villageoise
Argenteuil ou Ris-Orangis
Le merle sifflait la cerise
A la barbe des banlieusards
Dialogués par Michel Audiard
Et le soleil en jouant sur l'eau
Faisait jamais d'ombre au tableau.
Maint' nant j' vis dans le R.E.R.
Et quand j' me gèle au vent glacial
Je trouve qu' y manque vraiment pas d'air
Au milieu d' ses trois initiales.
LES MALHEUREUX SONT PAS CONTENTS
Les malheureux sont pas contents
Les pauvres deviennent franch'ment méchants
C'est emmerdant
Les chômeurs n'ont pas envie de rire
Et les comiques c'est de pire en pire
Les font gémir
Dans leurs fauteuils-télévisions
Les enculés ont mal au fion
L'irritation
Se faire mettre profond et si rigide
ça leur fout des hémorroïdes
ça devient sordide.
D'être toujours à jamais vaincus
Ils se grattent le trou de la Sécu
Z'ont mal au cul
Pour un peu ils deviendraient vulgaires
Z'en oublieraient les bonnes manières
Retourneraient primaires
Sur l'écran s'étalent des palaces
Des voyous qui parlent à leur place
A force ça lasse
Ils lorgnent leur taule un peu cradingue
Ils voient Schuller à Saint- Domingue
C'est tout de même dingue.
Ils se rappellent Super Menteur
Et comment on leur a fait peur
Aux électeurs
Sur les routes et puis même ailleurs
Les flics leur font des haies d'honneur
Pour leur bonheur
Quand ils leur sucrent leur permis
C'est pour leur espérance de vie
C'est c' qu'on leur dit
Ils ont beau chercher l'espérance
Ils en voient pas tell'ment en France
Drôle de substance.
Quelle époque c'est vraiment superbe
Les citoyens bouffent de la merde
Mais aux fines herbes
ça s' commercialise en sachets
Très hygiéniques mais sachez
On peut cracher
Cracher sur ces gueules de tafiottes
Tirer la chasse d'eau sur les chiottes
Et le bulletin de vote.
MERDE EN FRANCAIS
A Moscou on dit Tovarich
Et parfois Vladimir Illich
Et quand on est dans la débine
Je suis pas sûr qu'on dise Eltsine
Mais il est une chose que je sais
C'est qu'on n' dit merde qu'en français.
Aux USA on dit Dallas
Puis juste après on dit hélas
On r'pliant le fusil à lunettes
On r'part chasser sur la planète
Ce fera p't'êt' pas un succès
Moi je leur dis merde en français.
On dit amen au Vatican
Dieu te l'rendra, y sait pas quand
Y dit qu' plus tard tu s'ras heureux
C'est dommage qu'y l'dise en hébreu
J' comprends un peu mais pas assez
J' lui dirais bien merde en français.
A Madrid on dit franco d' port
Mais y faut pas le dire trop fort
On dit qu' les grenades sont bénies
Au grand marché Opus Déi
L' passé n'en finit pas d'passer
Il faut lui dire merde en français.
On dit Major, on dit Tatcher
Pour s'injurier à Manchester
Quand Ladi Di fait du ramdam
On dit chocking à Buckingham
L'anglais c'est vraiment compassé
On n'dit bien merde qu'en français.
On dit la messe en polonais
Et pour moi c'est du javanais
Ils peuvent se la dire en bantou
J' comprendrai toujours rien du tout
J'aime pas c' qu'on dit la tête baissée
Je préfère dire merde en français.
On dit Allah face à la Mecque
On tend l'autre face quand l' mec est grec
Excusez-moi d' dire enculé
Le grec, je sais pas bien l' parler
Mais il est une chose que je sais
On n' dit bien merde qu'en français.
On dit Toubon à la culture
C'est une erreur d' nomenclature
S'il était bon j'aurais d' la braise
Il aid'rait la chanson française
Et du coup j'aurais du succès
J' pourrais lui dire merde en français.
On dit notre maître chez les larbins
Et nique ta mère en maghrébin
Dans les Hauts de Seine on dit Pasqua
Dans les bas, on s' demande pourquoi
C'est des corses qui viennent vous taxer
Alors qu'on dit merde en français.
A Berlin on dit plus russkoffs
Mais à la place on dit Adolphe
On dit "ein zwei" en Germanie
Et l'on s' retrouve en Barbarie
On l' répét'ra jamais assez
On n' dit bien merde qu'en français.
NATHALIE
Tu leur joues pas le bicent'naire
Avec Decaux, avec Kouchner
Tu leur fais ça sans projecteurs
En noir, en rouge et en couleurs
Et le jour du quatorze juillet
Tu lances pas des pétards mouillés
C'est nature que t'es séductrice
Tes feux ne sont pas d'artifice.
Nathalie
Près de toi le rouge pâlit
La rose même est moins jolie
Tant pis si c'est d' la poésie
Nathalie
Pour toi l'histoire c'est pas du bluff
Qui s'arrête page quatre-vingt neuf
T' effeuilles le livre sans parenthèses
Jusqu'à la page quatre-vingt-treize.
Tu tires pas sur n'importe quoi
Ceux qui tombent savant très bien pourquoi
Les terroristes, comme ils disent,
Faut savoir qui ils terrorisent.
Nathalie
Les voleurs volent et c'est ainsi
Les gens du monde, eux, s'initient
Tant pis si c'est de l'ironie
Nathalie
Ils s'offrent tous à leurs grand' messes
Avec leurs chanteuses-patronesses
D' la bonne misère qui dure trois heures
Que l'on rythme au synthétiseur.
Ma chansonnette, moi, c'est zéro
Elle f'ra pas rire au Figaro
Au Nouvel Obs, etcétéra...
Mais rira l' dernier qui rira.
Nathalie
Ton bras qui jamais ne se plie
Laisse en ce monde une embellie
Tant mieux si c'est de l'utopie
Nathalie.